Assurance de prêt : les pratiques anticoncurrentielles
En matière d'assurance de prêt, certaines banques n'hésitent pas à se lancer dans des pratiques qui remettent en question la libéralisation du marché.

Sommaire
Quand 60% des frais d’assurance sont exclus du calcul du TAEG.Cotisations d’assurance "facultative" : une pratique douteuse à dénoncer.Quand 60% des frais d’assurance sont exclus du calcul du TAEG.
Fin juillet 2019, Séraphine et Timothée (les prénoms sont fictifs, le reste, malheureusement, non…), qui souhaitent investir dans un programme immobilier neuf en banlieue parisienne, reçoivent une offre de crédit d’un grand établissement bancaire mutualiste.
Au premier coup d’œil, ils sont satisfaits : ils bénéficient d’un prêt à taux zéro (PTZ), dont le TAEG total s’élève à 0,32% par an, et d’un second prêt, affichant un TAEG total de 1,95% l’an, assurance comprise donc.
Seulement, lorsqu’ils se penchent sur les chiffres bruts, la situation est loin d’être aussi idyllique, puisqu’en lisant les petites lignes, et en réalisant une simple addition, ils s’aperçoivent que le coût total de leur prêt ne s’élèvera pas à 58.090,62€, comme affiché sur leurs tableaux récapitulatifs (et encore faut-il prendre la peine d'agréger deux tableaux, cette présentation étant déjà discutable en elle-même), mais bien à 75.923,55€.
Un curieux et stupéfiant delta de près de 18.000€ tout de même (!), s’expliquant ainsi : leur banque a purement et simplement exclu du calcul de son TAEG 61,61% du montant des cotisations d’assurance, au motif que ces dernières seraient “facultatives”. A ce stade, un rappel à la loi s’impose : l’assurance de prêt est TOUJOURS facultative.
S’il est vrai que dans les faits, aucun organisme n’acceptera de vous prêter de l’argent sans couverture, et qu’à titre personnel, vous avez tout intérêt à vous protéger d’une éventuelle perte de revenus, vous n’êtes cependant pas légalement dans l’obligation de contracter une assurance emprunteur, quoi qu’en dise cette banque.
La distinction qu’elle opère donc entre ce qui relève, selon elle, de l'obligatoire et du facultatif est véritablement impropre, voire abusive. D’autant que la banque ne se donne même pas la peine de préciser à ces clients ce que cachent ces dénominations hasardeuses, ni dans le contrat ni dans un quelconque document annexe.
Rien ne permet de savoir ce que la banque a considéré comme "facultatif" pour l'exclure du calcul du TAEG et du TAEA. En réalité, il s'agit probablement de garanties excessives que la banque inclut sans vraiment en informer son client. En l’espèce, si l’on avait expliqué à Timothée et Séraphine, respectivement 31 et 29 ans, en bonne forme physique, exerçant l’un et l’autre une activité professionnelle, que rien ne les obligeait à se couvrir à 200% (c’est-à-dire 100% chacun), peut-être auraient-ils évité de souscrire à ce que cette banque à l’air de considérer comme une assurance “facultative”, c’est-à-dire, il est vrai, superflue au regard de leurs risques, mais dont elle se garde bien d’en afficher le coût réel.
***
Quoiqu’il en soit, en intégrant la totalité des sommes dues, le TAEG ( Taux du coût global du crédit) de leur PrTZ passerait de 0,32% à 0,69% l’an, le TAEG du second, de 1,95% à 2,35% l’an... Plus édifiant encore : le TAEA (Taux Annuel Effectif d'Assurance) du PTZ passerait de 0,23% à 0,60% l’an, le TAEA du second de 0,24% à 0,62%.
Donc, à tous ceux qui Facebook, en toute bonne foi, nous assuraient que les TAEA ne dépassaient pas les 0,25% en France, nous avons le regret d’apporter la triste preuve de ce que nous avancions dans notre article intitulé “Baisse des taux : l’assurance de prêt immobilier va vous coûter plus cher que votre crédit !” : oui, il est parfaitement possible, à l’heure actuelle, qu’un jeune couple vaillant, mais assuré pour une quotité en totale inadéquation avec ses risques, soit soumis à un TAEA de 1,25% l’an...
Pour ce prêt à taux zéro, 7111,52 € d'assurance ne sont pas retenus pour le calcul du TAEG. Il est affiché à 0,32% alors que le taux réel est de 0,60%

Le coût réel d'assurance qui devrait servir de base au calcul du TAEG et du TAEA se trouve plus loin dans l'offre en petits caractères

Dans cet exemple, 10 721,41 € ne sont pas pris en compte. Le TAEG réel est de 2,35% et pas de 1,95% comme pourrait le faire croire la présentation.

Le vrai coût de l'assurance pour ce prêt bancaire est de 17 443,61 € soit un TAEA de 0,62% et pas 0,24% comme affiché dans récapitulatif.

Cotisations d’assurance "facultative" : une pratique douteuse à dénoncer.
Alors, de deux choses l’une : soit il conviendrait que les juristes de ladite banque révisent très sérieusement le Code de la Consommation, soit, et c’est l’option qui malheureusement nous paraît la plus plausible, il s’agit là d’une volonté manifeste de duper ce jeune couple (et bien d’autres, c’est regrettable).
D’abord en entravant le jeu de la concurrence et en biaisant la comparaison des offres sur la base d’indicateurs en théorie similaires. Rappelons qu’en vertu de la loi Hamon et de l’amendement Bourquin, tout emprunteur a le droit de se soustraire à l’assurance de prêt proposée par l’organisme lui accorde/a accordé son crédit, s’il souscrit, auprès d’un tiers, un contrat présentant au moins le même niveau de garanties. Autrement dit, si un concurrent fait aussi bien, mais à moins cher, un emprunteur a légalement la possibilité d’aller voir ailleurs. Or comment faire un choix parfaitement éclairé si l’une des offres à notre disposition affiche des indicateurs incomplets, pour user d’un euphémisme ?
Mais plus grave encore : quelle proportion de la population est en capacité d’identifier et de rectifier les taux erronés par ces tours de passe-passe ? Car voyons les choses en face : les modalités de calcul d’un TAEG sont complexes, voire sibyllines pour le commun des mortels. Quand une banque utilise un montage habile pour volontairement minimiser son TAEG, fait elle autre chose que choisir en toute conscience de compliquer davantage la compréhension de son offre, et, nous osons le dire, d’induire en erreur ses (futurs) clients ? Fait elle autre chose que de jouer sur le défaut de culture financière et d’expertise légale de la plupart de ses emprunteurs ? Fait elle autre chose que de leur dissimuler le véritable coût financier du crédit qu’ils s'apprêtent à contracter ?
En conclusion et de notre point de vue, cette pratique n’est pas seulement critiquable pour ce qu’elle a de déloyal, mais aussi, et surtout, pour ce qu’elle a de trompeur. Si vous êtes également victimes de ce type de pratiques critiquables ou en avez connaissance, transmettez-les-nous à wedou@wedou.fr.
Vous pouvez facilement calculer votre TAEA réel sur notre simulateur en saisissant le coût global de votre assurance, il y a sûrement des économies à faire...
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